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La crise d’angoisse
Nommée également « attaque de panique » ou plus spécifiquement « névrose d’angoisse », la crise d’angoisse se traduit par l’installation brutale – sans circonstance déclenchante – d’un état d’anxiété intense. Souvent associée à un autre trouble psychologique (dépression, troubles anxieux, TOC), elle devient invalidante pour les patients atteints, surtout dans une forme chronique. Quels sont les symptômes d’une crise d’angoisse, comment l’explique la psychanalyse et que faire pour la calmer ? Pascal Couderc, psychologue clinicien à Montpellier et Paris, vous informe.
Les symptômes d’une crise d’angoisse
Les crises d’angoisses vont souvent de pair avec une peur de mourir de façon imminente ou de devenir fou. Parfois, la conscience de l’individu est défaillante, au point qu’il ne sait pas qui il est ou en quel endroit il se trouve.
L’attaque de panique s’accompagne d’une oppression thoracique et d’un resserrement épigastrique et laryngé très caractéristique (sensation de boule dans la gorge).
Le mot angoisse (du latin angustiae, étroitesse, resserrement ; Angst en allemand) fait précisément ressortir la gêne, l’étroitesse de la respiration au moment où se produit l’accès.
Les symptômes suivants de la crise d’angoisse peuvent aussi apparaître : tremblements, palpitations, augmentation du rythme cardiaque et de la tension artérielle.
Cet état intense d’anxiété peut devenir chronique ou généralisé. Il correspond alors à un sentiment durable de tension interne, de peur et d’insécurité qui perturbe la vie sociale du sujet, en l’empêchant de se concentrer et de continuer à nouer des relations avec son entourage.
D’un point de vue psychanalytique, l’angoisse prend racine lors de notre venue au monde. La naissance est la dernière étape à proprement parler. Le nouveau-né est d’un coup projeté dans le monde aérien, à la manière d’un astronaute qui aurait perdu sa combinaison spatiale. Il s’agit là d’une chute dans un vide.
Le traumatisme de la naissance : prototype de toutes nos angoisses ?
D’Otto Rank à Freud, nombreux sont les auteurs qui considèrent que l’expérience que le nouveau-né fait du traumatisme de la naissance est à l’origine de l’angoisse névrotique de l’adulte, qui s’incarne pleinement dans la crise d’angoisse.
Jusqu’au moment de la naissance, le bébé se trouve dans un état de plénitude. C’est le bonheur utérin, l’union primale. Tous les besoins sont satisfaits : le bébé se sent rattaché. Il vient de passer neuf mois de sa vie dans un milieu liquide, maintenu de toutes parts par la pression amniotique, sans être soumis à la pesanteur.
Mais, au moment de la naissance, les contractions utérines sont telles qu’elles le mettent dans un état de contrainte extrême. Puis, il s’engage dans le canal utérin où, là encore, la pression physique est considérable, avec certainement un sentiment très fort de suffocation. Il lui faut donc livrer bataille pour sa survivance.
Un moment angoissant qui rappelle l’attaque de panique. Il ne prendra fin que lorsqu’il aura perçu, dans un futur encore bien lointain, le sens intime de sa peau et de ses limites corporelles propres. Dans l’intervalle, c’est le contact et la chaleur du corps maternel qui reconstitueront « l’enveloppe de suppléance » la plus proche de l’état antérieur.
Le cordon ombilical coupé, le bébé se trouve pour toujours séparé de ce qui l’englobait (c’est le « paradis perdu »). Désormais, le voilà pris en charge de l’extérieur et non plus de l’intérieur, coupé de ce qui le contenait, le nourrissait, le réchauffait.
De cette étape, on ne se remet pour ainsi dire jamais. Cet état d’angoisse, de détresse psychique, de séparation, nous le revivons tous, à des degrés différents, dans notre vie de tous les jours.
L’angoisse pathologique et l’attaque de panique
On considère que l’angoisse de séparation de l’enfant avec sa mère devient pathologique lorsqu’elle prend la forme de violentes crises de panique. Il est normal qu’un enfant montre des signes d’anxiété dès qu’on le sépare de ceux qui le soignent. Mais l’angoisse pathologique se traduit par des états de sidération et des signes de détresse intenses et persistants.
On considère aussi que l’angoisse est pathologique dès que ses manifestations viennent à entraver le développement de l’enfant. La peur intense et excessive qu’il éprouve à chaque séparation nuira à ses apprentissages et à sa sociabilité.
Chez l’adulte, la crise d’angoisse est souvent associée à d’autres troubles tels que la dépression, à des troubles anxieux comme une phobie, à un trouble anxieux généralisé (TAG) ou à des troubles obsessionnels compulsifs (TOC).
Ce sont les femmes et les personnes atteintes de spasmophilie qui en seraient les plus victimes. Les substances excitantes comme le café ne sont pas étrangères non plus au problème.
On associe également l’attaque de panique à l’agoraphobie et au sentiment d’impossibilité à être secouru lors de la survenue de la crise. Un stress post traumatique peut aussi être un déclencheur.
Les traitements de la crise d’angoisse
Bannir tout excitant dont l’usage est propice à l’apparition d’une crise d’angoisse sera un préalable au traitement. Le thérapeute choisira souvent l’approche de la thérapie comportementale et cognitive ou TCC pour traiter ce trouble.
Un traitement médicamenteux des symptômes physiques pourra être envisagé conjointement par la prise ponctuelle d’un anxiolytique, de type benzodiazépine. Un accompagnement médical conjoint au soutien de la psychothérapie est donc nécessaire.
Lorsque les crises d’angoisse se succèdent, un traitement de fond peut être préconisé, à base d’antidépresseur de type Inhibiteur Sélectif de la Recapture de la Sérotonine (ISRS) sur plusieurs mois.
En résumé :
L’attaque de panique est un état d’anxiété intense qui s’accompagne d’un sentiment de perdre le contrôle et de symptômes somatiques extrêmes.
Sous une forme chronique, elle est fortement handicapante pour les personnes qui en souffrent. En effet, entre les crises, celles-ci vivent avec la peur de voir survenir une nouvelle attaque. Souvent, s’en suivent des conduites d’évitement qui perturbent d’autant plus leur vie sociale et professionnelle.
L’angoisse de séparation
Peut-on apaiser l’angoisse de séparation de l’adulte ? Oui, si tant est que l’on identifie ce trouble anxieux qui se révèle un handicap sur les plans affectifs et sociaux. Il est peu valorisé dans notre société d’êtres dépendants, ce qui induit souvent que l’on mette du temps à accepter d’être atteint « d’abandonnisme ». La thérapie est pourtant une voie possible pour sortir de cette souffrance qu’est la peur de l’abandon, qui, plus qu’une autre certainement, a pris racine dans l’enfance. Pascal Couderc, psychologue et psychanalyste à Montpellier et Paris, vous informe sur ce trouble psychologique.
Freud et l’angoisse de séparation
Freud, dans son ouvrage intitulé Inhibition, symptôme et angoisse, attribue la source de l’angoisse à la séparation, du moins à sa crainte et à la peur de la perte d’objet de désir (à l’origine l’amour de la mère).
Selon lui, l’angoisse est un état de détresse psychique du moi devant un danger qui le menace. Danger qui réveille la détresse psychique et biologique éprouvée par l’enfant en l’absence de sa mère, personne aimée et ardemment désirée. Freud fait donc de la crainte de la séparation le prototype même de l’angoisse.
Par la suite, lorsque l’individu se met à la recherche de nouveaux objets, il cherche non seulement à trouver un objet, selon Freud, mais à retrouver l’objet originel perdu (« paradis perdu »), qui avait autrefois apporté une satisfaction réelle.
Lorsqu’on parle de séparation dans un contexte de relation entre personnes, l’angoisse de séparation normale correspond au sentiment douloureux de crainte éprouvé par un individu lorsque la relation affective, établie avec une personne importante de son entourage, se trouve menacée d’interruption ou est interrompue.
Il peut s’agir d’une interruption par suite de la perte du lien affectif (perte d’amour) ou d’une rupture consécutive à une perte réelle de la personne importante. On parle plutôt de séparation lorsque la perte est provisoire, et de perte lorsque celle-ci a un caractère définitif. Cependant, les fantasmes de séparation tendent à se confondre avec ceux de perte, et la séparation est alors vécue comme une perte.
Les symptômes d’une angoisse de séparation chez l’adulte
Les personnes atteintes d’une angoisse de séparation ont intérêt à connaître les symptômes associés à ce trouble obsessionnel. Le but est de mieux comprendre que l’apparition de ses manifestations n’est pas objectivement liée à la réalité, mais à des déclencheurs émotionnels intimes. Le sujet doit donc être attentif aux symptômes suivants :
- des crises d’angoisse qui surviennent lorsqu’il est loin de ses proches ;
- des crises de panique à l’idée (irrationnelle) qu’il ne leur arrive quelque chose ;
- une certaine phobie sociale ou un malaise à sortir de chez soi ;
- des attaques de panique, des changements d’humeur et des crises de larmes ;
- des symptômes physiques tels que : insomnie, palpitations, maux de ventre fréquents, maux de tête, nausées…
Tous ces symptômes ne s’expriment pas en même temps. Cependant, plusieurs d’entre eux exprimés conjointement permettent de conclure à une angoisse de séparation de l’adulte.
Bien souvent, elle peut subvenir à la faveur d’une nouvelle relation amoureuse. En rencontrant un partenaire qui donne l’impression de combler des vides affectifs existants, le sujet en conçoit un attachement excessif qui va dériver vers une peur de l’abandon, chaque fois que l’objet de désir s’éloigne.
Cette sensation particulièrement désagréable est invalidante. Elle rend la personne dépendante et peut affecter sa vie sociale dans son ensemble. Une angoisse profonde liée à une angoisse de séparation génère un risque dépressif certain.
Il est par conséquent recommandé de parler de ce problème dans un premier temps à son médecin traitant. Celui-ci peut orienter vers un thérapeute spécialisé dans ces types de troubles. L’approche comportementale est certainement la plus utilisée aujourd’hui. D’autres méthodes axées sur la relaxation, la respiration et la maîtrise des pensées négatives gagnent du terrain aujourd’hui.
L’anxiété de séparation : phénomène universel
L’angoisse de séparation de l’adulte
Les troubles ressentis sont si proches et si familiers que nous devons presque faire un effort pour nous apercevoir qu’une angoisse de séparation est en nous.
Pensons simplement à ce que nous disons lorsque nous accueillons ou nous quittons des amis ou des proches. « Je me réjouis de te revoir, je te croyais disparu, j’étais inquiet de ne plus recevoir de tes nouvelles… ne me laisse pas seul… »
À travers ces mots, nous exprimons dans les circonstances apparemment les plus banales, un besoin fondamental de relation affective en même temps qu’une nostalgie à la pensée de quitter une personne chère. L’anxiété de séparation traduit donc l’émotion douloureuse – plus ou moins consciente – qui accompagne la perception du caractère éphémère des relations humaines, de l’existence d’autrui et de notre propre existence.
Mais en même temps, c’est une émotion structurante, car percevoir la douleur de notre solitude nous fait prendre conscience d’une part que nous existons en tant qu’être seul et unique par rapport à autrui, et que autrui est différent de nous. C’est ainsi que l’angoisse de séparation fonde notre sentiment d’identité aussi bien que notre connaissance de l’autre.
Lorsqu’elle est apprivoisée, l’angoisse de séparation devient source d’élan de vie. Car apprivoiser la solitude, ce n’est pas supprimer l’angoisse, mais apprendre à y faire face et à l’utiliser pour la mettre au service de la vie.
Alors, se sentir seul signifie prendre conscience qu’on est soi-même unique, que l’autre est également unique, et le lien de relation qu’on entretient avec soi-même et avec autrui devient infiniment précieux.
L’angoisse de séparation chez l’enfant
Chez le jeune enfant, les peurs liées à la séparation font une vive apparition autour du 8e mois. L’enfant va ressentir de l’anxiété et exprimer des réticences à quitter les bras de sa mère.
Cette étape est normale et importante, car c’est à ce moment-là qu’il apprend à comprendre que les choses peuvent disparaître en continuant d’exister. Les psychologues pour enfant ne cessent d’ailleurs de vanter, à ce propos les vertus des jeux de cache-cache.
Le rôle des parents dans la construction d’un lien sécurisant est censé permettre à l’enfant d’acquérir pas à pas son autonomie pour s’émanciper peu à peu. Une incapacité à couper des liens plus tard, est souvent déjà l’indice d’adaptations manquées à cette étape de la petite enfance.
L’angoisse de castration
L’angoisse de castration est étroitement liée à la résolution du complexe d’Œdipe. Celui-ci apparaît au cours du troisième stade, dit aussi « stade phallique « (3-5 ans), de l’évolution de l’enfant. Le mythe de « l’innocence de l’enfant », accepté depuis longtemps, fut bouleversée par la théorie psychanalytique et notamment grâce à la psychologie freudienne. En découvrant la sexualité infantile, elle décrivit le développement sexuel de l’enfant, comme passant par différents stades appelés encore stades libidinaux. D’un point de vue analytique, le complexe de castration, traumatisme lié au complexe œdipien, serait aussi la source de toutes nos névroses.
Le complexe d’Œdipe : terreau de l’angoisse de castration
Les stades libidinaux
L’angoisse de castration est indissociable du complexe de castration. Il faut noter que la succession théorique des stades qui président à ce complexe, n’est pas limitée et fixée dans le temps. Elle est caractérisée par des périodes, plus ou moins longues, selon les enfants.
Le premier stade est dit oral, le second anal ou sadique-anal, le troisième phallique, le quatrième dit phase de latence et le cinquième enfin, dit stade génital.
Vers 3/4 ans l’enfant met en place une manipulation des organes génitaux. Il fait la découverte de son sexe. Il commence par découvrir le plaisir érotique cutané qu’il obtient grâce aux attouchements : c’est la période de la masturbation infantile directe ou indirecte, obtenue par une excitation comme un frottement de cuisse, par exemple.
Le complexe d’Œdipe du garçon
Le petit garçon remarque à cet âge l’absence de pénis chez sa mère. Il commence d’abord par nier l’évidence. Puis, lorsqu’il accepte cette idée, il a peur de perdre le sien : c’est « l’angoisse de castration ».
Cette angoisse est d’autant plus grande que ses parents ne manquent pas de lui interdire de manipuler sa verge, ou du moins de l’en dissuader. L’enfant a peur d’une punition brutale qui consisterait à lui couper son pénis.
Le complexe d’œdipien chez la fille ou complexe d’Électre
La petite fille, elle, n’a pas peur de perdre son sexe, mais elle est jalouse. Elle aurait aimé aussi être pourvue d’un phallus : c’est « l’envie du pénis ». Elle cherche auprès de son père à l’acquérir ou du moins à obtenir ce qu’elle ressent comme un équivalent : un enfant.
Chez la petite fille, les problèmes sont beaucoup plus compliqués. À cet âge, l’enfant (garçon ou fille) ne connaît qu’un seul organe génital : le pénis. En effet, le vagin n’est découvert qu’aux approches de la puberté. La différenciation des sexes ne peut être faite que par rapport au pénis : peur de le perdre chez le garçon, désir de l’acquérir chez la fille.
La petite fille voit, elle, dans le clitoris comme un commencement de pénis, qui va grandir après-coup. Chez elle, l’angoisse de castration est donc redoublée. D’une part, l’angoisse de ne pas avoir de pénis : il lui manque un attribut essentiel, elle n’est pas un garçon. D’autre part, l’angoisse inconsciente de devoir attendre – jusqu’à quand ? – la compensation inconsciemment escomptée du clitoris grandi.
Cette découverte de la différence anatomique des sexes s’accompagne d’une grande curiosité sexuelle et d’un intérêt pour les mystérieuses activités des parents dans leur chambre. Le problème de la fécondation commence à se poser. Comment les enfants viennent-ils au monde ? L’enfant imagine la vie sexuelle de ses parents comme une activité agressive, sadique, dans un rapport de dominé-dominant. C’est le « fantasme de la scène primitive ».
L’angoisse de castration : c’est quoi ?
Le complexe de castration
La naissance du complexe de castration se fait parallèlement à une autre découverte. L’enfant se rend compte de la relation triangulaire qui existe entre lui et ses deux parents. Il s’aperçoit que la mère éprouve un sentiment tendre envers le père et que lui-même n’est pas le seul objet de préoccupation de sa mère. Cette découverte marque l’entrée dans le « complexe d’Œdipe ».
L’agressivité, la jalousie marquent les rapports du garçon avec la figure paternelle. Sa préoccupation principale est de devenir l’unique objet du désir affectif de la mère. Le père est un rival plus ou moins dangereux qui occupe la place convoitée dans le lit maternel. Une sorte de rivalité s’instaure entre le petit garçon et son père. C’est celui des deux qui sera le plus fort, le plus grand, le plus rapide à la course, etc.
Cette compétition représente un déplacement inconscient de la rivalité sexuelle. Lequel des deux a le pénis le plus intéressant pour la mère ? L’enfant cherche en même temps à être comme son père et à l’écarter. Il éprouve la crainte que son père ne le punisse et ne lui supprime son pénis.
Ces sentiments ambivalents sont donc doublés d’une angoisse de castration. Cette angoisse peut être telle qu’elle bloque tout désir de compétition. Il s’installe alors une sorte de soumission passive au père.
Puis l’admiration prend le relais.
La relation du complexe de castration avec l’Œdipe est complète :
- il ouvre l’équivalent du complexe d’Œdipe, soit le complexe d’Électre à la fille qui commence à désirer le pénis paternel ;
- il clôt l’Œdipe du garçon en venant arrêter le désir vers la mère puisqu’il serait puni par le père.
Ces deux notions jouent un rôle fondamental dans la structuration de la personnalité et dans l’orientation du désir humain et de ses pulsions (libido). Les psychanalystes en font l’axe de référence majeur de la psychopathologie.
Névroses et angoisse de castration
L’expérience très intense du complexe de castration peut se réveiller chez l’adulte de façon non consciente, sous forme d’angoisse de castration. L’enfant qui n’aurait pas réussi à renoncer à être le phallus de la mère, pouvant plus tard développer une angoisse, non seulement relative à son sexe, mais à son intégrité complète. Une souffrance psychique qui rappelle celle d’une angoisse de séparation.
Freud affirmera : « Le complexe de castration est l’expérience du trauma le plus fort de la jeune vie du garçon. Les effets de la menace de castration sont multiples et incommensurables. Ils concernent toutes les relations du garçon avec son père et sa mère, plus tard avec l’homme et la femme de façon générale ».
L’expérience psychanalytique place l’angoisse de castration au-delà de tout doute et nous invite à y reconnaître la clé de nos névroses.
Une analyste comme Françoise Dolto a trouvé d’autres applications à cette angoisse liée au fonctionnement psychique de l’enfant. Elle y voit l’un des déterminismes d’une névrose comme l’échec scolaire chez les garçons. Ceux-ci seraient bloqués du point de vue pulsionnel dans leur curiosité intellectuelle, par peur d’égaler le père, notamment dans les apprentissages du calcul, associés dans l’inconscient aux rapports de supériorité, d’infériorité et de différences.
L’angoisse de mort
Que nous apprend l’angoisse de mort en psychanalyse ? C’est bien parce que nous ne savons rien de la mort qu’elle nous angoisse. Comment concevoir de ne rien en savoir, de ne rien en avoir vécu et de tendre ainsi chaque jour vers elle, inexorablement. Quoi de plus angoissant que de savoir qu’une séparation définitive nous attend, séparation d’avec la vie, d’avec les autres et d’avec soi-même et sa conscience d’être au monde. Pascal Couderc, psychanalyste à Montpellier et Paris, vous en explique davantage sur cette peur de la mort commune à tant d’humains.
Naître à la mort
Le développement de l’angoisse de mort
L’angoisse de mort en psychanalyse a été mise en rapport avec la peur de l’annihilation telle que peut la ressentir le nourrisson face aux dangers externes. Une approche psychanalytique comme celle de Mélanie Klein la considère comme innée et originaire.
Pour Françoise Dolto, « l’expérience de la naissance est la première expérience de l’émergence de la mort » dans Parler de la mort. Notre venue au monde nous installe parmi ceux qui vont mourir. Elle implique d’emblée une perte : celle du placenta protecteur vécu par le nouveau-né comme une part de lui-même. Cette notion de perte est importante, car c’est elle qui tout au long de notre vie réactive l’angoisse de la mort, selon la psychanalyse.
On peut dire que c’est l’émergence de la vie sexuelle et par voie de conséquence l’accès vers l’âge adulte, qui entraînent les représentations psychiques mortifères et l’angoisse de mort.
La perte de l’enfance pour accéder à l’âge adulte nécessite l’acquisition des valeurs accordées à la vie et à la mort. Ainsi donc, l’idée et la notion de la mort sont nécessaires pour quitter l’enfance (les enfants se croient immortels).
Cette dualité (couple) vie – mort est le fondement même de la vie adulte. Il est par exemple classique et normal que certains adolescents témoignent d’une attirance ou d’une répulsion pour les événements macabres (obsèques, cimetières, etc.) en raison du symbolisme de ces événements et de leur participation dans l’évolution psychique.
N’oublions pas qu’être adulte signifie « devoir mourir » un jour. L’angoisse de la mort en psychanalyse résulte donc de l’affrontement de deux idées : vouloir vivre et devoir mourir. Il s’agit d’une évolution naturelle et normale de l’état psychique.
C’est la mort des autres qui nous fait prendre conscience de notre mortelle condition
« Moi aussi, je vais mourir. » Un constat propre à l’homme et impossible pour l’animal qui vit dans l’ignorance du sort qui l’attend. Être un homme, c’est craindre la mort et inventer des rituels pour marquer son passage.
Les spécialistes de la préhistoire ne parlent « d’ hominisation » qu’à partir du moment où les grands singes velus, que nous tenons pour nos premiers ancêtres, se sont mis à honorer leurs morts par des rites funéraires. Pourquoi ont-ils, dans la foulée, inventé les religions ? Probablement pour essayer de donner un sens à la vie et des images à la mort, univers de l’invisible et du non-représentable par excellence.
Ce n’est pas un hasard si la majeure partie de la littérature philosophique s’emploie à nous aider à la penser. Peut-être, pour mieux la dénier. Il est inutile d’y songer déclare Épicure : « tant que nous sommes là, elle n’est pas ; quand elle est là, nous ne sommes plus ». Ou essaye-t-elle tout simplement de nous persuader de l’accepter avec sérénité.
Angoisse de mort et psychanalyse
Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, conçoit la pulsion de mort comme une pulsion visant à l’abolition des tensions, à un état de non-être qui serait l’un des buts de tout organisme vivant. Par conséquent, le sommeil, pour les psychanalystes, correspond à une pulsion de « mort ». Il existe les pulsions de « vie », celles qui nous gèrent au quotidien et qui en général prennent le dessus. Le sommeil répond à une pulsion de mort (inactivité inconsciente où l’on ne maîtrise plus rien, à commencer par ses rêves).
L’insomniaque s’empêche de répondre à cette pulsion de mort. Moins il dort et plus, inconsciemment, il se persuade qu’il est encore en vie. C’est d’ailleurs le cas des bébés qui pleurent la nuit, bien souvent pour répondre à l’angoisse des parents : dire que tout va bien. « Tu vois maman, c’est la nuit et je suis en vie, alors rassure-toi, il ne m’arrive rien. » Pourtant le sommeil répond à un besoin physiologique. Paradoxe de la situation, si l’on ne dort pas, on finit par mourir.
Il existe aussi une théorie freudienne, dérivée du principe de plaisir, nommée le principe de Nirvana. Le but de ce principe serait de réduire l’excitation non pas à un certain seuil, comme le principe de plaisir, mais de la réduire à néant. C’est de ce principe que naîtra l’angoisse de mort en psychanalyse.
Peur de la mort ou peur de mourir : quelle différence ?
La peur de la mort n’est pas la même chose que la peur de mourir. La mort est prise comme entité, représentée et nommée comme s’il s’agissait de quelqu’un. Certaines légendes la représentent comme « la faucheuse ». Elle vient et vous emporte. Ce n’est pas vous qui décidez et c’est là que l’angoisse prend son sens. Comme si c’était quelqu’un qui décidait pour vous le moment où vous ne serez plus sans finalement vous « demander votre avis ».
Or sa vie n’est-ce pas le principal élément de soi ? Sans la vie on ne peut être. La peur de la mort ce serait la peur de ce qui est « nommable » sans pour autant prendre un sens concret. Un voyage vers l’inconnu que l’entendement ne pourrait atteindre.
Pour Jung, la peur de la mort est l’une des causes qui amène à combattre le changement. Dans Métamorphoses de l’âme et ses symboles, il affirme que « le névrosé qui ne peut se libérer de sa mère a pour cela de bonnes raisons». Au fond, ce serait l’angoisse de mort qui l’en retient.
La peur de mourir est plus à rapprocher d’une angoisse à vivre, de cette incapacité à profiter pleinement des événements de son existence. Cette incapacité serait liée pour certains aux difficultés rencontrées durant l’enfance ou à la suite de traumatismes survenus à l’âge adulte. Lorsque cette peur est trop grande et qu’elle donne lieu à des comportements phobiques, il est important de consulter afin de mieux repérer les événements en cause.
Vous souhaitez être aidé pour sortir d’une angoisse de mort ? En visioconsultation ou dans son cabinet, Pascal Couderc, psychanalyste à Montpellier et Paris, vous accompagne. Il travaille aussi sur les angoisses séparation et de castration. N’hésitez pas à consulter.